La Garotterie : voyage en terre catholique irlandaise

LA GAROTTERIE  Voyage en terre catholique irlandaise

C’est une longue histoire que celle de cette propriété, une des plus anciennes de Saint Herblain, cernée de ses vieux murs et toujours présente dans cette proximité de Nantes.

Les plus vieux actes parlent d’une terre  nommée Garotterie ou Garouterie.

D’une terre à une habitation plus ou moins importante, la possession passe dans de nombreuses mains décrites dans un texte précédent : les premiers possédants français de la Garotterie, jusqu’au moment où l’ensemble des terres et bâtiments est vendu à des  premiers arrivants irlandais (voir ensuite les contrats livrets d’acquet) issus de Waterford, ville maintenant jumelée avec Saint-Herblain!

 

Le 28 octobre 1692 est signé le contract d’acquisition de la maison de la Garrotrie et de nombreuses terres en dépendant  par  Nicolas Lée l’aisné et son épouse Anne Gerraldin d’avec mad.e Françoise Renard veuve de Latonel. 

A la suite de cet achat, de nombreuses familles irlandaises catholiques de marchands installés à la Fosse à Nantes (certains habitant réellement le domaine) vont se succéder jusqu’à nos jours dans la propriété, soit par filiation directe, soit par branches latérales ou achats.

Les registres paroissiaux nantais  de Saint Nicolas, puis ceux de Saint Clément et Saint Similien, suivis de ceux de Chantenay et de Saint Herblain témoignent de nombreux baptêmes, mariages et sépultures concernant les familles irlandaises se succédant LEE, GILACH, ARCHER, FITZ-SIMONS, MAISONNEUVE, RIVIERE des HEROS, POLO, LESAFFRE.

Les notes de Mme Lesaffre

La dernière habitante de la propriété Madame Mary Lesaffre, catholique très croyante, a légué à sa mort en 1968 la propriété de la Garotterie  à la congrégation des sœurs de l’Agneau de Dieu.

Elle a laissé aussi des documents très intéressants sous la forme de 93 feuillets tapés à la machine qui permettent d’entrer dans l’histoire de ces familles irlandaises vivant à cheval sur la fosse à Nantes et sur la Garotterie, entre autres résidences.

Cela suppose de sa part un intérêt marqué pour l’histoire de son  bien  et beaucoup de temps consacré.

Ce qui suit en est extrait.

Un fief en 1692

Devant les Notaires Royaux Lebreton et Verger le 28 octobre 1692 ont signé à la Fosse à Nantes le contract d’acquisition Nicolas Lée l’aisné, Anne Gerraldin son épouse acheteurs et Françoise Renard, veuve de Latonel, vendeuse de la maison de la Garotterie.

Le lieu et  maison noble terre et appartenance de la Garotterie tant noble que roturier, se consistances en maisons, métairie, cours, pressoirs, celier, pigeonnier, écurie, fanerie et autres logement, un enclos tant en jardin  verger, vigne et allées, que la chapelle domestique. Le tout clos de murailles, contenant par fond avec lesd. logement et cours quatre vingt boisselées ou environ cernoïé d’un chemin tout autour.

Suit une liste de 29 terres, dont certaines sont bâties, pâtures, terres labourables, bois, moulin, dont les surfaces sont décrites en boisselées,  cantons et andains (à la mesure locale nantoise). Ces terres sont dispersées et s’étendent des Dervallières à l’est, au Tillé au nord, à la Crémetterie au sud et aux petites barrières à l’ouest; s’y ajoutent 3 terres en vallées de Saint Herblain, d’Indre et du Coudray.

L’ensemble est cédé moyennant le prix et somme de huit mil livres tournois.

Cet acte mis au clair et tapé à la machine à écrire par Madame Lesaffre permet par ses détails des terres et des noms de riverains d’entrer un peu dans ce domaine transmis sous le règne de Louis xiv.

La limite basse de la propriété perdurera jusqu’à la création de la cité HLM des Dervallières en 1959 car la coulée, ruisseau versant dans la Chézine, formait aussi la limite entre Nantes et Saint Herblain. Il fallut alors changer la frontière communale lors de l’achat du terrain et la réalisation du boulevard du Massacre.

Un aveu du 16 mars 1683

Isabelle LeClerc, femme de feu François Peigneu, lieu ‘’hautes moullines’’ ……… et terre labourable, avec un moulin ’’avant’’ avec un petit logis du meunier, avec une pièce et terre nommée le petit moulin appartenant aux ‘’Levistines’’ du feu Sieur de la Bouteillerye, autre bout de terre dépendant de la Maison de la Garotterie et d’autre le grand chemin qui conduis de Nantes à Saint Etienne de Montluc.

Les familles irlandaises

La très catholique Irlande résista autant qu’elle put à la dominance anglaise. Henri VIII devint pourtant roi d’Irlande en 1541 et ce fut par la guerre que ce roi et ses successeurs tentèrent d’imposer la religion réformée au peuple irlandais.

La province d’Ulster au Nord resta seule en résistance et pour en venir à bout des propriétaires irlandais furent chassés et remplacés par des Anglais de 1601 à 1611. Sous l’oppression et la misère les Irlandais se révoltèrent en 1641, cela se termina par une invasion déclenchée par Cromwell en 1649. L’Irlande gaëlique et catholique, transformée en une colonie, ne survivait que dans le fond des campagnes, le reste étant anglicanisé, les lois pénales instituées en 1695 déniant tout droit aux Irlandais.

Le port de Nantes, à partir de 1560,  avait reçu un premier contingent d’Espagnols, suivis de Portugais et d’Italiens, mais ce sont les Hollandais et Flamands, marchands de la Hanse, qui vont être dominants jusqu’à l’afflux des Irlandais à la fin du XVIIe siècle.

La région nantaise, par son débouché portuaire et son commerce florissant, devint une destination  privilégiée pour les nobles et les bourgeois irlandais voulant préserver leurs biens et leur foi. Ils prirent une part prépondérante dans le développement de la ville, en particulier dans le quartier de la Fosse, là où l’on pouvait commercer avec le monde entier. 

Beaucoup avaient connu le métier des armes et ils se montreront aventureux et entreprenants. Une majorité d’entre eux se fit naturaliser français et leurs affaires florissantes leur permettant l’acquisition de fiefs ou propriétés, ils furent assez nombreux à rechercher et obtenir l’anoblissement.

Un fermage aux Hauts Moulins en 1738

Nous soussignés Philippe Gilagh, à Joachim Bernier, à Renné Minyer femme du dit Bernier avons fait le présent en Double, par lequell, moy Gilagh ay affermé au dit Bernier et René Minyer sa femme, une Bourderie situé au Village des moulins paroisse de St. Herblain, consistant en maison taiterie cellier, vignes à terre labourable pour le terme de neuf années quile ont commencé à la toussaints dernière mil sept cent trente sept, pour en finir que a pareille jour de l’année que l’on compte mil sept cent quarante six, pour en jouir en pere de famille, et de couper aucun arbre par pied, ny tente, jouiera seulement d’une courbe des emondes, pendent le cours de la presente ferme et des epines et buiailes en les coupant en tems saisons, et en reparant les fossés et hayes en bonne estat, les ayant recue de mesme, et tout de la meme maniere que en a jouir  sy devant le nommé Rigaud et donc le dit Bernier et Renné Minyer sa femme, dits avoir parfaite connoissance et renonce a an demander plus ample explication et c’est pour la somme de soixante livres par chaque anné, payable a la toussaints de chaque anné échut, et en outre, donnera le dit Bernier trois journées par fauchere, et trois autres journées pour d’autres travaille, et sa femme aidera à la lessive et savoneme lorsque  bessoin  sera ; bien entendue que la vigne est à moitiez et rendue au pressoir de la maison, et fera le dit Bernier des proins et plantes, ou il sera besoin faite double a nantes le 23 mars 1738.

J. Bernier                                                                                                    Philippe Gilagh

Un échange de terres en 1749

Devant les notaires royaux comparaissent haut et puissant seigneur  Messire Jan Stapleton  chevalier comte de Treves, Seigneur des Dervallières  et autres lieux, demeurant en son château des Dervallières paroisse de Chantenay d’une part et dame marie Knowles veuve d’Ecuyer Philippe Gilagh demeurant à la fosse de Nantes paroisse de Saint Nicolas d’autre part.

A cédé dame Gilagh un e pièce de terre labourable dans les coulées  contenant environ une journée et demi de bœufs. Cette pièce bornée d’un bout au Nord terres detellier, d’autre bout terres des coteaux dépendant de la Garotterie, d’un bout au ruisseau qui descend de la lande de mames-, d’autre côté au couchant de terre de la dite dame.

Au long et dans l’alignement de ce dernier débordement a été expressément conditionné du consentement de la dite dame Gilagh que le dit Seigneur comte de Treves prendra l’alignement pour conduire les murs projetés de son parc.

Plus la dite dame cède au même titre d’échange dans la sensive des dervaux la pièce en friche de la borderie de la veuve Guérin, contenant soixante et une cordes, la dite pièce bornée de toutes parts terre et parc des dervalières

Plus deux petits quantons de terre, plus le droit de tirer de la part du coteau qu’elle se réserve le droit de tirer les roches et pierres dont il pourra avoir besoin pour l’usage des murs qu’il espère en l’accroissement de son parc des dervalières, dans l’étendue des dites coulées et coteaux.

En échange le dit Seigneur a cédé un canton de terre dans la sensive des dervaux, plus cinq à six sillons et deux petits cantons de terre dans les mêmes lieux, plus la pièce des héronnières bornée d’un bout au levant ruisseaux qui dessend de la lande de mames et un canton de terre en friche dans la pièce de l’ouche aux renard contigu, le tout  situé en la paroisse de Saint Herblain.

A la charge aux parties de tenir entrevu les dites terres échangées des Seigneurs d’où elles se trouvent relevées, d’y faire et rendre les obéissances ainsy que les fiefs le requerent.

Ce qui a été voulu et consenty fait et passé au Château des dervallières et ont les parties signé l’an mil sept cent quarante neuf le vingt  troisième avril.

          Fouqureau                                                                                          Jalaber                                                          

        Notaire Royal                                                                                       Notaire Royal                                                                                             

Une sombre histoire d’héritage

Requête est faite devant Mathurin lebrun Sieur dumeny procureur fiscal du prieuré d’indre et de Bouaye, présentée par marie Gilagh à la diligence de maître Julien René Rousseau, procureur au présidial de Nantes.

L’héritier direct de nombreux biens, dont la Garotterie, l’Ecuyer thomas Gilagh, né le 24 avril 1731, étant décédé sans enfant le 21 octobre 1757, dame marie Gilagh  veuve en secondes noces de noble homme pierre de Saint Martin, veuve chajotte de la grande Chassalerie le mortemara de Boisse en 1ères noces, dit qu’elle est habile à lui succéder. Elle étoit sa tante à la mode de Bretagne, sa généalogie va le prouver.

Elle est issue du mariage de christophe Gilagh et de dame marie Williams (extrait de baptême du 6 juillet 1693)

Thomas Gilagh est issu du mariage de Philippe Gilagh et de dame marie Knolle sa veuve et Thomas, il était lui-même issu du mariage de Jacques Gilagh et de dame Eleonore macdenorete, suivant extraits de baptême et de sépulture fournis.

Les dits sieurs Jacques et Christophe Gilagh étaient frères  germains suivant certificat fourni. 

Ce certificat doit faire pleine foy dans les circonstances qu’il est notoire que les curés catholiques d’Irlande ne tenaient point de magistrat rapport sur deffenses du gouvernement protestant, qui prohibe sous de rigoureuses peines l’exercice de la Religion Catholique, apostolique et Romaine.

Dame marie Gilagh, si elle a l’avantage d’être française d’origine, réside à Barcelone en Espagne, ce qui est en sa défaveur. Il faut donc à celui qui plaide sa cause mettre en avant le fait qu’elle n’a pas fixé irrévocablement sa résidence en Espagne et s’appuie sur les traités passés entrela France et l’Espagne.

Au final la demandeuse devra prendre domicile en France et obtient la main levée de la succession demandée par ordonnance du 20 février 1759.

Ecuyer Sylvestre Gilagh, négociant établi à la fosse à Nantes, se porte caution volontaire de l’évènement de la dite main levée.

                                 

Liquidation de la succession de Mme Gilagh en 1766

Voilà que dame marie Gilagh décède à son tour et que sur foi de son testament en date du 27 août 1764 la liquidation de sa succession est ouverte à sa mort le 11 février 1766.

Les biens lui appartenant sont importants mais très divers et assortis de diverses dettes et à valoir non réglés et ils vont faire l’objet d’un partage compliqué.

LEGS MOBILIERS :

Les liquidités ne vont pas couvrir les frais d’obsèques et les nombreux legs mobiliers faits aux œuvres d’un montant total de 13 182 L

Cela concerne les pauvres de St Nicolas et du Sanitat, les malades pauvres de l’hôtel dieu, la communauté des prêtres irlandais, M. françois White son filleul et héritier partiel, Melle Archer sa filleule, plus à M. l’abbé Fils Simons le surplus de ses meubles (dont la vente produira 5 165 L). 

DETTES MOBILIAIRES ET FRAIS FUNERAIRES :

Ils s’élèvent à 38 882L. soit 7 666 L. de plus que les facultés mobiliaires, les légataires ne pouvant bénéficier que sur les valeurs mobiliaires, épuisées, ceux-ci  ont été assurés de recevoir leurs legs par la volonté exprimée par les héritiers de leur en donner droit et moyens.

COMPTE AVEC L’ABBE FILS SIMONS

Celui-ci, héritier de l’abbé Macmahon, est intéressé pour un crédit de 131 244 L., un débit de 119 442 L. soit en positif pour 11 801 L.

FACULTES MOBILIAIRES

Evaluées à un montant de 31 215 L. elles consistent en un billet de M. de Laker, les meubles vendus 5 069 L. et divers revenus de biens.

FACULTES IMMOBILIAIRES

C’est avant tout un imbroglio de comptes positifs et négatifs liés à des comptes de succession  non soldés entre ces familles irlandaises très liées dans le commerce et par les mariages.

Madame Gilagh, du chef d’Edmond Géraldin, qui en avait hérité d’andré Géraldin et de marie Lée, était fondée au ¾ dans des héritages pour 18 724 L., l’autre quart dont elle avait l’usufruit appartenait à M. l’abbé Macmahon dont l’héritier sera M. l’abbé Fils-Simons en 1787.

Mais le principal est d’une autre importance.

Trois maisons situées à la fosse valent                                                                                                                                                   90 300 L.

La vente de la Garotterie et dépendances rapportera                                                                                                                              27 400 L.

La rente annuelle de la Garotterie est de 100 L. par an.

Le produit de la vente des biens en pays d’Aunis, venus du chef de Catherine Craack, légués à l’abbé FilsSimons par Mme Gilagh, sera en réalité attribué à M. White de Malleville  du fait de sa filiation largement prouvée.                                                                              34 500 L.

Les autres biens de la fosse acquis pendant sa communauté en 1738 et 39 sont de                                                                                22 164 L.

Une maison à la fosse vaut                                                                                                                                                                       72 000 L.

Les héritages achetés pendant sa viduité et qu’elle a attachés à la Garotterie de 1752 à 1754  sont de                                                    2 508 L.

REALITES EN CAPITAL COMPTES TENUS DES DROITS ET DETTES

Il lui est attribué un total provisoire de 208 459 L. mais qui se réduira à                                                                                         109 929,17 L.

Les héritiers font valoir leurs droits sur la Garotterie

Autour de l’année 1776 deux cousins, prêtres de leur état, échangent alors des correspondances à ce sujet. Ils sont pourtant résidents proches : l’Abbé Jacques Mac Mahon réside aux Dervallières, l’Abbé Fitz Simon réside à la Garotterie et est lui-même héritier potentiel du premier, ils sont cousins au 3ème et 4ème degré.  Seulement L’Abbé Fitz Simon semble pressé d’hériter et essaie de prouver sa primauté sur le fief, quitte à aller en justice, ce dont l’Abbé Mac Mahon le dissuade.

Celui-ci décède le 16.11.1780 et dès décembre 1780 l’Abbé Jacques Fitz Simon obtient la propriété pleine et entière de la Garotterie.

 Il est le fils de Christophe Fitz Simons et de Mary Daly.

Un acte daté de 1787 montre que les possessions de la Fosse à Nantes ont fait l’objet d’une succession différente vers les White à partir du décès de Mme Gilagh.

Compte de recette et payement de la propriété de 1781 à 1794

Monsieur Jean Kelly de Nantes fait au propriétaire de la Garotterie, l’Abbé Fitz Simon, un compte rendu détaillé intéressant, car il décrit les différents fournisseurs et débiteurs et les coûts correspondants. 

Nous y voyons les noms des locataires et les montants des loyers, le détail des achats de nourriture et le coût des interventions des artisans.

Cela permet d’en déduire un certain niveau de vie et les habitudes alimentaires du propriétaire.

Les loyers étaient payables à la Saint Jean Baptiste et à Noël.

Recettes globales :    43 082,11 Livres

Payements globaux : 42 759,13 Livres

Solde :                            322,17 Livres

Des mariages dans une petite chapelle

Dans la petite chapelle de la Garotterie des évènements familiaux y étaient célébrés. Ils concernaient plutôt les paysans environnants. 

N’oublions pas que l’église du bourg n’était joignable que par 5 kilomètres de chemins creux.

Les propriétaires, du fait de leur nombreuse parenté et importantes relations, se déplaçaient en la paroisse de Saint Nicolas à Nantes où ils résidaient pour leurs affaires, puis plus tard en l’église du bourg de Saint Herblain.

 Le 24 oct. 1752 y sont célébrées les noces de Jean Béchu (veuf de Thérèse Bernier) et de Anne Guérin, en présence de Marie Knowles, Vve  Gilagh et de Sylvestre Gilagh.

Le 27 nov. 1764 y ont lieu les noces de Mr le Recteur Pierre Charles décrété de Justice par la Juridiction du Marquisat de la Musse et de Bernier Jeanne en présence de Marie Knowles, Vve Gilagh, de Marie et Elisabeth Archer, de Jacques Fitz Simons prêtre et de Jacques Mac Mahon protoNotaire apostolique.

Autres possédants et habitants

Le 4 septembre 1757 eut lieu l’enterrement de Patrice Archer (négociant, époux de Marie White), dcd la veille en sa maison de la Garotterie.

Le 20 octobre 1757 eut lieu de même l’enterrement de Thomas Gelagh  (26 ans, capitaine au régiment de Dillon, infanterie irlandaise) dcd la veille en sa maison de la Garotterie.

A la mort à 83 ans à la Garotterie de l’abbé Fitz Simons le 13 novembre 1813, la propriété passe dans les mains de sa nièce Marie Claire Fitz Simons, née le 8 août 1792 à Dublin. Elle est la fille de Hugues Fitz Simons négociant à Dublin et de feu Elisabeth Mac Mahon.

Elle s’est mariée à 18 ans le 17 avril 1811 à Pierre Henri Maisonneuve, 30 ans,  avocat à Nantes au 2 rue de Briord.

Ils ont une fille Marie Claire Henriette Maisonneuve née le 2 avril 1814 à Nantes.

La mère de celle-ci décède à 33 ans le 15 juin 1826 à la Garotterie.

Marie Claire Henriette M. demeurant à Saint Herblain, épouse le 26 juin 1838 à 24 ans Jean Julien Maisonneuve 32 ans avocat rue d’Orléans à Nantes. Celui-ci est né à Nantes le 24 juillet 1806. 

Il sera maire de la commune de 1844 à 1848 et décèdera à la Garotterie le 14 janvier 1871 à l’âge de 64 ans.

Ils ont eu une fille Mary Maisonneuve, née le 28 mai 1839.

Elle épouse à la maison commune de Saint Herblain le 1er mai 1865 Alexandre Rivière des Héros, 30 ans, domicilié chez ses parents à Nantes 5 rue de Coutance.

Le 15 mai 1867 naît leur fille Jeanne Aimée Rivière des Héros.

Celle-ci épouse Jean Marie Jules Polo, docteur en médecine, né à Nantes le 16 mai 1856, fils de Jules Polo et Eugénie Luise Rozier.

Le 13 décembre 1902 décède en sa demeure de la Garotterie Marie Claire Henriette Maisonneuve à l’âge de 88 ans. La déclaration de décès est faite par Antoine de la Touche, Bain de Bretagne, son gendre et par Léon  Polo, docteur en médecine à Nantes, 46 ans, son petit fils.

Le 20 avril 1934 décède à 77 ans  en sa demeure de la Garotterie Jean Marie Jules Polo.

Le 19 avril 1936 décède à 69 ans en sa demeure, idem, Jeanne Aimée Rivière des Héros épouse du précédent.

Une seconde fille, prénommée Marie, était née de Alexandre Rivière des Héros et de Mary Maisonneuve. 

Elle épousa Eugène Jean Aristide Gouze, notaire à Sautron où il habitait le château de la Linière.

Ils eurent deux enfants Mary, Jeanne, Fanny, épouse Lesaffre née le 29 mai 1896 à Nantes, et Jean, Léon, Eugène, né le 6 juin 1897 à Nantes  les derniers propriétaires de cette dynastie.

Les différentes possessions vers 1950

Contrairement aux terres de la Crémetterie et de la Branchoire qui avaient intégré le fief des de la Musse les possessions des familles irlandaises, propriétaires de la Garotterie depuis 1692, sont restées indépendantes. Elles ont  beaucoup changé de mains entre elles, comme nous venons de le voir,  sans perdre leurs liens. Il reste à souligner cependant que la transmission a été beaucoup faite par les femmes, faute de descendants mâles et même de descendant tout court (cas de Mme Lesaffre , entre autres).

Le patrimoine de Mme Lesaffre venait pour l’essentiel du lot 1 qui lui fut attribué, comme le lot 2 que reçut son frère Jean Gouzé, les 5.07 et 2.09.1939 lors du partage en succession de leur mère Mary Rivière des Héros (veuve de Eugène Gouze) et de leur tante Jeanne Rivière des Héros (veuve de Léon  Polo) demeurant à la Garotterie. 

Mme Lesaffre était donc à la tête de nombreuses terres proches, de part et d’autre de la route de St Etienne de Montluc. Elle était très avenante et estimée.

Son frère Mr Jean Gouze possédait,  entre autres, deux fermes sur Orvault, une sur Couëron, mais intervenait aussi auprès des métayers de sa sœur. Il était installé au château de la Bessardais en Cordemais.

Comme sa sœur il vivait des rentes et produits des fermes et des terres.

La rencontre d’habitants ayant connu la période où les fermes de la Garotterie étaient en activité m’a permis de comprendre comment était le quartier à l’époque de la dernière guerre, juste avant l’arrivée de l’urbanisation.

En plus des quatre fermes il y avait quelques maisons disséminées aux alentours mais l’essentiel était agricole.

Tout près en direction de Tillay la minoterie a tourné jusqu’aux années 1960.

Mr Legrand père avait une petite ferme sur place jusqu’en 1945 avec 2 ou 3 vaches. Puis la minoterie fut vendue à un transporteur, puis devint un magasin d’outillage avant d’être transformée en immeuble d’habitation. Les habitants actuels du n°17 de la rue des Bas Moulins ignorent peut être  qu’ils habitent dans une ancienne minoterie. 

De la rue des Bas Moulins un passage piétonnier marqué de pierres debout rejoignait le chemin du Massacre.

Trois maraîchers, les frères Poisson et Mr Harbert, exploitaient des terres aux Hauts Moulins.

Dans les murs de la Garotterie il y avait de 15 à 20 moutons et leur bergerie (encore existante), on les emmenait brouter dans la propriété et dans un pré de 2 hectares autour d’une pièce d’eau juste en face en direction du Tillay. 

Pendant la guerre les allemands firent démolir le mur du haut de la propriété. Une tranchée de liaison entre les tranchées antichars, dont une passait près de la forge de Mr Chatelier, suivait le mur du parc et ce jusqu’au chemin du Massacre. Ces tranchées auraient été rebouchées plus tard par des prisonniers allemands.

Francis Prampart était jusqu’à la guerre le jardinier, l’homme à tout faire et le bedeau de la chapelle ; celle-ci étant ouverte à tous. Sa sœur fut la femme de ménage de la grande maison jusqu’à son mariage avec Mr Dibon. Francis  resta vivre sur place jusqu’à sa mort.

Il n’eut pas de remplaçant  attitré tout de suite. Mr Guyard loua 2 ha de jardin.

Mr Bastard Marcel arriva de Sautron en 1951 comme locataire et employé à ses temps perdus, comme il dit, temps où il s’occupait de l’entretien, des labours et des moutons alors qu’il était livreur de vaisselle. Sa femme était l’intendante du château. Ils habitaient dans le premier logement à gauche dans la cour, ce logement eut ensuite comme locataires successifs des vicaires de la paroisse Sainte Jeanne d’Arc  à la Contrie toute proche. 

A la demande des sœurs qui voulaient transformer les lieux, Mr Bastard partit en 1970 s’installer avec sa famille face au centre social de la Crémetterie.

En plus des quatre fermes principales il y avait celle des Hauts Moulins dont les terres allaient des hauts moulins aux grandes barrières, lieu de la forge de Mr Chatelier, soit actuellement jusqu’à la polyclinique de l’Atlantique et la nouvelle maison de retraite.

Cette ferme fut semble-t’il achetée avant la dernière guerre  par Mr Joseph Poisson, ancien cocher de la Garotterie et locataire un temps.

Mme Lesaffre possédait aussi le terrain et maison appelés Moulin de la Garotterie, qu’elle vendit à des amis Mr et Mme Rose. Le fût de l’ancien moulin existe toujours sur ce terrain de la rue des Hauts Moulins dont le propriétaire a changé récemment. Ce fût, resté longtemps nu, reçoit en décembre 2008 des constructions nouvelles, sans doute en vue de le transformer en habitation.

Autres ventes du patrimoine

Mme Lesaffre, désargentée malgré tout, vendit d’abord des terres du côté de l’actuel magasin  Carrefour à Mr Turpin, maraîcher.

A la date du 18.07.1947 nous retrouvons trois ventes faites à des particuliers de terrains du côté de la Crémetterie dans le secteur de l’actuelle rue Michel Delalande terres des Gauderies et de l’Ouche à Renaud à l’origine. 

Ces ventes, aux familles Libeault, Le Pichon et Lucas, furent réalisées à l’étude de Me Lorfeuvre, notaire à St Etienne de Montluc. Elles lui permirent de remplacer sa calèche à cheval que conduisait Francis Prampart par une petite Simca 5 fourgonnette, puis par une 2cv Citroën neuve, ainsi qu’une autre pour sa nièce Mme de Courrèges.

De son côté et à la même époque, Jean Gouze son frère, suite à son mariage et à la naissance de son fils Ambroise, vendait les 15 et 23.09.1947, la ferme de la Galonnière en Couëron à Monsieur Joseph Brétécher, son métayer depuis 1930. Cette personne ne nous est pas inconnue puisque c’est le père de Mme Thérèse Lucas, personne bien connue à Histoires Mémoires pour ses écrits sur la vie paysanne, dont elle puise beaucoup dans les souvenirs de sa jeunesse à la Galonnière. 

Les fermages par semestre y variaient alors de 1 000 à 2 000 Francs de l’époque entre 1931 et 1945.

L’achat de cette ferme très morcelée de 12 ha ne fut pas des plus facile car Mr Gouze voulait en extraire la partie la plus rentable de 2 ha (d’une valeur équivalente à la ferme des prés de la Vallée : pré de la rive dans la vallée de la Musse. Il fallut que Mr Brétécher trouve l’appui des autres paysans acheteurs éventuels afin qu’ils ne l’empêchent pas d’acquérir en fin l’ensemble de la ferme.

Ventes pour lotissements et grande surface commerciale

Mme Lesaffre fut ensuite expropriée de ses terres de l’autre côté du chemin du Massacre dans les années 1950 en vue de la construction de la cité des Dervallières.

En 1955 elle vendit ensuite 19 ha 65 sur les terres de Tillay le long du chemin du Massacre au Comité Ouvrier du Logement, lequel réalisa un premier lotissement, suivi d’un second assez rapidement. Dans les mêmes temps il fut même prévu dans le secteur un groupe scolaire de 220 élèves dont l’emplacement fut déplacé plus tard.

En mai 1958 elle vendit 2 335 m2 aux Docks de France pour la construction d’un magasin d’alimentation.

En janvier 1961 elle vendit 8 600 m2 supplémentaires à la Société des Supers Marchés, car le futur magasin était repoussé en arrière par le projet  d’élargissement à 40 m. de la route de Saint Etienne de Montluc et à 20 m. du chemin du Massacre et par celui de la création de la place circulaire des Chataigners d’un rayon de 80 m.

Ensuite la Société des Supermarchés et les Docks de France avaient revendu les terrains concernés à la Compagnie Financière de Suez.

Ce sera au final la réalisation du premier grand magasin du secteur, inauguré le 30 octobre 1969, employant 250 personnes sur 6 627 m2 de surface de vente. Le 4 avril 1973 il prend le nom de Euromarché, puis plus tard le nom actuel de Carrefour.

Puis elle est sollicitée par la SCI  Nantes / Saint Herblain qui veut lui acheter 2 ha 67 a le long de la route de Saint Etienne de Montluc et ce afin d’y réaliser un lotissement de petits immeubles.

Le 8 janvier 1962 elle écrit aux mairies de Nantes et de Saint Herblain afin d’obtenir des conditions particulières pour créer un lotissement sur le terrain de 6 ha 50 a. lui restant entre le COL et le reste de la Garotterie.

Par lettre du 15 mars 1962 la Mairie de Nantes accepte son projet de division de sa propriété pour création d’un lotissement à la condition du respect de nombreux impératifs techniques, de la prise en charge entre autres de travaux de voirie et ce pour une somme approchant les 40 000 NF  et, ce qui n’est pas rien, de céder gratuitement 900 m2 de terrains concernés par les élargissements de voies prévus.

L’accord se réalisa, ce sera le lotissement des Hauts Moulins. Le lotissement est approuvé par arrêté préfectoral du 27 décembre 1963. Une lettre du 17 novembre 1964 adressée à la Mairie de Saint Herblain demande des informations sur les redevances futures concernant les logements collectifs qui seront créés sur la parcelle de 28 000 m2 de Mme Lesaffre.

Quatre fermes au final

Les fermes étaient groupées deux par deux. 

Devant la propriété Mr Briand exploitait dans ce qui est devenu la belle maison en angle au n°3 rue de la Garotterie.

Il aurait été remplacé par Mr Barré.

Mr  Jarnoux à partir de la maison voisine devenue le n°5 exploitait des terres du côté de la Crémetterie. Il était surnommé ‘’mon ch’veau’’ car toujours accompagné de son cheval; à cette époque les 2 fermes étaient contiguës.

Les deux exploitations furent séparées et aménagées en habitations, à l’initiative de Mme Lesaffre, quand après la guerre les terres furent vendues.

La première fut attribuée à sa nièce et filleule Mme de Courrèges qui y tint quelques temps une école primaire libre avant de quitter les lieux vers 1975. 

La seconde, ex maison du meunier et appelée ‘’le Mesnil’’ fut vendue en août 1972 à Mr Henry-Baudot par Mr Gouze, après la mort de sa sœur Mme Lesaffre. L’acheteur la quitta fin  2007.

Deux autres fermes contiguës, reliées par des écuries, étaient situées à  l’angle actuel de la rue de la Garotterie et de la rue Colonac, côté Garotterie. Elles totalisaient 20 hectares. 

Elles ont été remplacées dans les années 1950 par des pavillons (dont un salon de coiffure, redevenu habitation depuis un moment).

La première était la ferme de Mr Sylvestre qui exploitait les terres de l’actuel supermarché Carrefour, tout en travaillant en usine à Nantes.

La seconde, exploitée un moment par Joseph Poisson, eut ensuite comme métayer Mr Choimet lequel, après avoir habité dans la propriété de la Garotterie, exploita à partir de cette ferme les terrains correspondant au lotissement actuel de la rue des Hauts Moulins. Il y avait là de très beaux châtaigniers; deux exemplaires énormes subsistent de nos jours, dont un de 200 ans.

Après le décès de Mme Lesaffre

Par testament, Mme Lesaffre très croyante, fit don à son décès le 22 juillet 1968, de la propriété de la Garotterie à l’Institut de l’Agneau de Dieu, congrégation de sœurs catholiques, en vue d’y établir une Communauté religieuse au service des familles et des personnes âgées.

Les premières sœurs arrivèrent en 1969, il fut réalisé pour cela des travaux d’agrandissement, ce qui nécessita la vente de la partie nord du domaine  dont les murs étaient déjà disparus,  et ce pour un lotissement de pavillons situés de nos jours allée des Sitelles et allée des Verdiers.

Malgré tout derrière ses vieux murs et fermée à l’arrière par le lotissement, la propriété et le parc boisé gardent une part de singularité dans le quartier pavillonnaire environnant. Les fleurs y ont la part belle et le potager y a toujours son utilité, loué et entretenu comme il l’est par 2 retraités des alentours.

C’est un lieu de calme et de verdure, bien caché derrière un porche et une cour accueillants et le bâtiment principal et les anciennes écuries qui ont gardé le charme et la simplicité d’autrefois.

Sources

  • Archives de Mme Lesaffre 93 feuillets dactylographiés en 1J 266 Archives Départementales de L.A.

  • Paroles d’habitants :

    • Mr Bastard Marcel maison de retraite de la Bourgonnière

    • Mr et Mme Lechat Albert 20, rue des Bas Moulins

    • Mr et Mme Poisson Maurice 5, rue St Exupéry

    • Mr et Mme Guyard Lucien 20, rue de la Blanche

    • Mr Henry-Baudot ex du 3, rue de la Garotterie

    • Mme Lucas Thérèse Histoire Mémoires de Saint Herblain pour la Galonnière

  • Archives Municipales de Saint Herblain

  • Servantes de l’Agneau de Dieu 4, rue de la Garotterie

Bibliographie

  • Naître et renaître   Mille ans d’histoire  Saint Herblain 

            Marie Dominique POT

2010

Daniel PORCHERET

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